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L'Homme et le Pouvoir
La Homo kaj la Potenco

Nous menant à la rencontre des hommes qui s'organisent, prennent des décisions collectives, les appliquent, les rejettent, la thématique "L'Homme et le Pouvoir" nous dévoilera la complexe géographie des organisations humaines.

Kondukante nin alrenkonte de la homoj, kiuj sin organizas, faras leĝojn aŭ alprenas komunajn decidojn, ilin aplikas, forĵetas, la temo "La Homo kaj la Potenco" al ni malkaŝos la kompleksan geografion de la homaj organizaĵoj.

"L'homme est un animal social", écrivait Aristote il y a plus de deux millénaires. Il l'est encore : aujourd'hui comme hier, il est difficile pour un être humain de ne faire partie d'aucune organisation, a fortiori sociale. Dès sa naissance, l'individu voit son existence régie par les règles d'une collectivité. Il grandira et vivra dans l'espace que lui aura accordé cette collectivité, et qu'il aura tant bien que mal adapté à sa propre volonté. Quel est cet espace ? Où commence l'individu, où finit la collectivité ? Et inversement ? Quels sont les rapports de l'individu aux collectivités dont il est membre ? Ce sont les questions que nous voulons soulever ici.

"Homo estas socia animalo", jam skribis Aristoto antaŭ pli ol du jarmiloj. Li ankoraŭ estas tio: hodiaŭ kiel hieraŭ, malfacilas por homa estaĵo esti parto de neniu organizaĵo, des pli de neniu socia organizaĵo. Ekde lia naskiĝo, la vivon de la individuo mastras la reguloj de iu komunumo. Li kreskos kaj vivos en la spaco al li donita de tiu komunumo, kaj de li bone-malbone adaptita al sia propra volo. Kio estas tiu spaco? Kie komenciĝas la individuo, kie finiĝas la komunumo? Kaj inverse? Kiuj estas la rilatoj inter la individuo kaj la komunumoj en kiuj li membras? Tiujn demandojn ni volas starigi ĉi tie.

Les manifestations, défi de l'Homme ou d'hommes envers la collectivité ?

L'individu, par la confrontation aux règles qu'il est tenu de suivre, prend la mesure de l'organisation sociale dont il fait partie. S'il lui prend l'envie de faire le compte de ses droits et devoirs ou de jeter un oeil inquisiteur aux règles et usages, il verra qu'il est un peu tard pour protester : les débats ont été tranchés sans lui. Le contrat social lui a été signé dans le dos ! Il ne lui reste plus qu'une chose à faire : suivre les règles. Ou bien ? Ou bien entrer résolument en conflit avec elles. En s'écartant des règles, l'homme pourra se confronter à la collectivité et éprouver ses limites. Il éprouvera les limites qui séparent un individu de la collectivité : quels sont les actes qu'il peut mener en toute liberté ? quels sont ceux qui sont interdits ou encadrés ? peut-il s'exprimer librement dans les médias ? sur la place publique ? en privé ? doit-il passer par la collectivité pour régler un différend avec son voisin ?

La individuo, per la konfronto al la reguloj kiujn li devas obei, mezuras la socian organizaĵon kies parto li estas. Se li ekvolas nombri siajn rajtojn kaj devojn aŭ ektrarigardi la regulojn kaj kutimojn, li vidos, ke iom malfruas por protesti: la debatojn oni finis sen li. La socia kontrakto subskribiĝis for de li. Li havas nur unu aferon por fari: sekvi la regulojn. Aŭ? Aŭ decide ekbatali kontraŭ ili. Malobeante la regulojn, la homo povos ekstari kontraŭ la komunumo kaj provi ties limojn. Li provos la limojn kiuj apartigas individuon de komunumo : kiujn agojn li povas fari tutlibere? kiuj agoj estas malpermesitaj aŭ enkadrigitaj? ĉu li povas libere paroli en la amaskomunikiloj? en publika loko? en privata? ĉu li bezonas la komunumon por solvi malkonsenton kun sia najbaro?

Il ne faudrait pas en déduire que la collectivité n'est qu'un ensemble de contraintes : derrière une contrainte se cache souvent une protection, comme derrière un devoir, un droit. La collectivité, en obligeant l'employeur à respecter un minimum salarial, garantit cette somme à son employé. De même, quand elle se fait arbitre d'une discorde entre deux personnes, si elle en punit une, c'est pour protéger l'autre. On voit par là que la volonté de la collectivité surpasse celle de l'individu, et que pour vivre en paix il vaut mieux éviter de réveiller son courroux.

Ne nepre konkludindas, ke komunumo estas nur devigaro: malantaŭ devigo ofte kaŝiĝas protekto, same kiel malantaŭ devo, rajto. La komunumo, devigante la dunganton respekti minimuman salajron, garantias al la dungito tiun sumon. Same, kiam ĝi arbitracias konflikton inter du personoj, se ĝi punas unu, estas por protekti la alian. Tiel oni vidas ke la komunuma volo superas la individuan, kaj ke, por pace vivi, plej indas ne veki ĝian koleron.

Chaque individu évolue ainsi dans un espace de droits et de devoirs qui constitue une géographie complexe. Voilà justement la géographie que nous explorerons, dans le cadre de notre virée "L'Homme et le Pouvoir".

Ĉiu individuo tiel evoluas tra spaco de rajtoj kaj devoj kiuj konsistigas malsimplan geografion. Jen precize la geografio, kiun ni esploros kadre de rondiro "Homo kaj Potenco".

Ces droits et devoirs déjà définis lorsqu'il les reconnaît comme tels, l'individu les a en partie faits siens : chacun bâtit ses repères dans la norme sociale qui le voit grandir. Ce qui viendra certainement compliquer les relations que l'individu entretient avec le collectif et ses normes : la société façonne l'homme comme l'homme façonne la société.

La frontière est d'autant plus ténue que la collectivité n'existe que par les individus qui la constituent. Il est délicat de penser : "Moi, je suis moi. La collectivité, ce sont les autres." Les autres, c'est chacun. À ce titre, chaque individu est un peu la collectivité. Il en est le fondement et la légitimité. Car à quoi bon une organisation collective sans personnes à qui elle s'applique ? Dans un territoire donné, s'il y a des lois, c'est qu'il y a des individus qui s'organisent, et, quelle que soit l'autorité qui fait naître les lois, les applique et prend les décisions collectives, c'est l'existence de un plus un plus un plus un, etc., individus qui fait que ces lois, ces décisions, cette autorité, ont une raison d'être.

Tiujn rajtojn kaj devojn, jam difinitajn kiam li agnoskas ilin, alproprigas al si la individuo: ĉiu konstruas siajn markojn en la socia normo, kie li kreskas. Tio ĉi certe malfaciligos la rilatojn kiujn la individuo tenas kun la komunumo kaj ties normoj: socio knedas homon samkiel homo knedas homon.

La limo estas des pli maldikega, ke la komunumo ekzistas nur per la tuto de la individuoj, kiuj konsistigas ĝin. Estas malfacile pensi: "Mi estas mi. La komunumo estas la aliaj." La aliaj estas ĉiu. Tiukadre, ĉiu individuo estas iome la komunumo. Li estas ĝia fundamento kaj ĝia leĝeco. Ĉar kiucela estus komuna organizaĵo sen personoj kiujn ĝi interesus? En iu difinita teritorio, se estas leĝoj, tio signifas ke estas individuoj kiuj organizas sin, kaj, ne gravas kiu potenco naskas la leĝojn, aplikas ilin kaj faras la komunajn decidojn, estas la ekzisto de unu plus unu plus unu, ktp., individuoj kiu faras ke tiuj leĝoj, tiuj decidoj, tiu potenco, havas kialon por esti.

L'homme est sujet et fondement des lois, mais il en est aussi le garant. Et plus le fonctionnement de la collectivité s'approche d'un système dit démocratique, moins cette responsabilité est théorique. Une question se pose : si chaque individu est responsable des lois et décisions collectives, par quels mécanismes exerce-t-il cette responsabilité ? Quelle est la distance qui sépare un individu de la loi ou de la décision, prise collectivement, qui le concerne ?

La somme théorique des responsabilités individuelles constitue le pouvoir : par qui est-il exercé ? est-il concentré dans les mains de quelques-uns ? est-il confié à des représentants ? combien en reste-t-il à chacun ?

La homo estas la subjekto kaj la fundamento de la leĝoj, sed li estas ankaŭ ties garantianto. Kaj ju pli la funkciado de la komunumo proksimiĝas de iu tiel nomata demokratia sistemo, des malpli teoria estas tiu responso. Stariĝas demando: se ĉiu individuo responsas pri la leĝoj kaj komunaj decidoj, per kiuj meÌanismoj li efikigas tiun responson? Kiu estas la distanco kiu apartigas iun individuon de la leĝo aŭ de la decido, komune farita, kiu interesas lin?

La teoria sumo de la unuopaj responsoj konsistigas la povon : kiu efikigas ĝin? Ĉu ĝi estas koncentrita en la manoj de kelkaj? Ĉu ĝi estas konfidita al reprezentantoj? Kiom restas da ĝi por ĉiuj?

Le Sénat, une assemblée parlementaire à suffrage indirect

Assemblées parlementaires à suffrage direct, démocratie participative, dictature de la volonté d'un seul... les biais qui séparent un individu des décisions collectives qui le concernent sont variés. Il doit y avoir autant de systèmes de prise de décisions différents qu'il y a d'organisations. Et c'est peut-être dans la plus commune et idéalisée de ces organisations, la démocratie, qu'il y a le plus à fouiner : dans les infinies nuances qui les distinguent les unes des autres, et en font des systèmes, finalement, bien différents.

Prenons l'exemple du mode de répartition des richesses : comment fonctionne-t-il ici et là ? que doit -financièrement- l'homme aux sociétés auxquelles il appartient ? des impôts, des cotisations ou une dîme ? comment sont distribuées les richesses présentes sur le territoire ? comment se font les arbitrages entre homme et groupe ? laisse-t-on ici à l'homme ses biens quand dans un autre pays la société les prélève ou les met en commun ?

Parlamentaj asembleoj kun rekta baloto, partoprena demokratio, diktaturo de la volo de unu... la artifikoj kiuj apartigas individuon de la komunaj decidoj lin interesantaj estas multformaj. Probable estas tiom da malsamaj decidfaraj sistemoj kiom estas da organizoj. Kaj eble en la plej kutima kaj idealigita el tiuj organizoj, demokratio, estas plej multe por traserĉi: en la senfinaj nuancoj kiuj distingigas la unuajn de la aliaj, kaj faras el ili sistemojn, fine, tre malsamajn.

Kio, ekzemple, pri la maniero por distribui la riĉaĵojn: kiel estas distribuataj la riĉaĵoj? kion ŝuldas -finance- la homo al la socioj al kiuj li apartenas? impostojn, kotizojn aŭ dekonaĵon? kiel redistribui la riĉaĵojn kiuj estas ĉe la teritorio? kiel oni arbitracias inter homo kaj grupo? ĉu oni lasas tie al la homo liajn propraĵojn, kiam en alia lando la socio ilin impostas aŭ komunigas?

Voici que point à nouveau la question du lien entre l'individu et sa collectivité : qui fait qui ? l'individu ferait-il autant la loi que la loi ferait l'individu ?

La loi semble avoir ici une condition subjective, dans ce sens que, justement, elle est le fruit de ses sujets. Elle ne tire pas tant sa valeur d'un schéma théorique que de son application pratique à un instant social donné. Elle naît dans certaines conditions sociales, pour mourir, désuète, dans d'autres. Et ne passe pas facilement les frontières.

C'est ici qu'Hadès a son rôle : balader les lois, les organisations humaines, les modes de prises de décision, d'une contrée à l'autre. Pour les confronter, les comparer, les regarder naître, muter, mourir. Et voir ainsi quels contours prend la géographie des individus et de leurs collectivités.

Jen ekaperas denove la demando pri la ligo inter la individuo kaj lia komunumo: kiu faras kiun? Ĉu la individuo tiom faras la leĝon, kiom la leĝo farus la individuon?

La leĝo ŝajne havas ĉi tie subjektivan kondiĉon, en la senco ke, ĝuste, ĝi estas la frukto de siaj subjektoj. Ĝi prenas sian valoron malpli de iu teoria skemo ol de sia praktika apliko dum iu preciza socia momento. Ĝi naskiĝas en iuj sociaj kondiĉoj kaj mortas malaktuala en aliaj. Kaj ĝi ne facile trapasas limojn.

Tie Hades havos sian rolon: promenigi la leĝojn, la komunajn organizojn kaj la manierojn por fari decidojn, de iu lando al alia. Por konfronti, kompari ilin, rigardi ilin naskiĝi, ŝanĝiĝi aŭ morti. Kaj tiel vidi laŭ kiuj randoj formiĝas la geografio de la individuoj kaj de iliaj komunumoj.

Tradukis Emmanuel Villalta

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